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« Vous combattrez les juifs et aurez le dessus sur eux de sorte que la pierre dira : ô musulman ! Voici un juif caché derrière moi, viens le tuer. » Pour avoir publié ce message, le 12 octobre, sur sa page Facebook personnelle, suivie par 2 100 personnes, l'imam de la mosquée de Beaucaire (Gard), Yassin E., a été condamné, ce jeudi 2 novembre 2023, en comparution immédiate devant le tribunal correctionnel de Nîmes, à huit mois de prison avec sursis, assorti d'une interdiction d'exercer la fonction d'imam pendant un an. Il a également été inscrit sur le fichier des auteurs d'infractions terroristes et sera inéligible pendant une année. Les faits ont été signalés à la justice par le préfet du Gard.
Le Franco-Marocain de 32 ans, arrêté et placé en garde à vue dans la nuit de lundi à mardi, à l'aéroport de Marignane, alors qu'il revenait d'un pèlerinage à la Mecque, via la Jordanie, était poursuivi pour « apologie publique d'un acte de terrorisme commise au moyen d'un service de communication au public en ligne », et pour « provocation publique à la haine ou à la violence en raison de l'origine, l'ethnie, la nation, la race, ou la religion ». À LIRE AUSSI Antisémitisme : retour au Moyen ÂgeSon domicile et la mosquée ont été perquisitionnés, lui-même placé en détention provisoire jusqu'à son jugement. Le texte qu'il a publié sur sa page Facebook est un hadith, extrait du recueil de tous les dires, faits et gestes de Mahomet, deuxième pilier théologique et législatif de l'Islam, avec le Coran. C'est aussi « l'un des textes fondateurs du Hamas », rappelle en préambule le président du tribunal, Denis Weisbuch. En le publiant, cinq jours après l'attaque meurtrière du mouvement islamiste en Israël, qui a fait 1 400 victimes, l'imam gardois a-t-il voulu appeler au meurtre des Juifs en France ?
« Il n'a jamais appelé à la haine ou à la violence »
Barbu, le cheveu ras, son visage fin cerclé de grandes lunettes rectangulaires, Yassin E., depuis le box des prévenus, s'en défend avec vigueur. « La première fois que j'ai lu ce hadith, je ne le connaissais pas », affirme ce père de quatre enfants, qui a exercé dans deux mosquées de Nîmes avant d'être nommé à Beaucaire. Pour lui, c'était « le récit de ce qui allait se passer à la fin des temps », et d'ailleurs, « c'est une pierre qui parle ».
« On comprend mal comment, en lisant cette phrase-là, vous ne vous soyez pas dit qu'elle posait une difficulté », s'étonne le magistrat. « Une erreur dans la précipitation », plaide l'imam, qui jure avoir voulu supprimer sa publication « dès qu'il a vu qu'il y avait une ambiguïté ». Il dit avoir « toujours appelé à la paix, jamais à la haine et à la violence ».
À LIRE AUSSI Guerre Hamas-Israël : les images insoutenables du pogromC'est ce que viendront confirmer, tour à tour, quatre fidèles de la mosquée cités par la défense. « Il n'était pas dans le radicalisme, pas dans le salafisme », raconte Ibrahim, artisan boucher. Pour lui, « son erreur, malheureuse et grave, a été de poster ces écrits religieux sans contexte, et en français ». Mohammed, cadre ferroviaire, a assisté au prêche qui a suivi la publication du message incriminé : « Il s'est adressé à l'audience et aux jeunes pour les mettre en garde contre les effets néfastes des réseaux sociaux sur leurs pensées et leurs émotions. » Lui non plus n'a « jamais entendu de sa bouche un appel à la violence ou à la haine ».
« C'est un vecteur de haine et un empoisonneur public »
Mais pour Andrea Assor-Doukhan, avocate de l'Organisation juive européenne, qui s'est constituée partie civile, Yassin E., un homme « qui a fait des études et a un certain niveau d'instruction », n'est rien d'autre qu'un « vecteur de haine » et un « empoisonneur public ».
La publication de ce hadith sur Facebook est un « appel au meurtre », cinq jours après l'attaque terroriste du Hamas. « Force est de constater que ce conflit engendre de l'insécurité pour les Juifs français », déplore-t-elle, en rappelant les « 857 actes antisémites recensés depuis l'attaque du 7 octobre ». « On vient vous dire que c'est une maladresse sortie du contexte. Le problème, c'est que ces images, ces enseignements, dans des esprits faibles et un peu trop malléables, peuvent mal s'imprimer et mener au passage à l'acte. »

Une deuxième publication épinglée
« Errare humanum est, perseverare diabolicum » (l'erreur est humaine, mais persévérer est le fait du diable), lance le procureur Vincent Edel, qui affirme que l'imam est également poursuivi pour une seconde publication, le 16 octobre, montrant le drapeau palestinien et la mosquée Al-Aqsa, et appelant à rendre la Palestine et la mosquée « comme ils étaient ».
À LIRE AUSSI Massacre du 7 octobre : comment les défenseurs du Hamas s'inspirent de la rhétorique nazie « Vous devez le juger sans céder à la passion et à la pression », plaide l'avocate de Yassin E., Saphia Foughar. Certes, concède-t-elle, les faits de provocation publique à la haine sont caractérisés par la publication du hadith, mais c'est « une erreur de sa part qui ne reflète pas ce qu'il est habituellement. S'il multipliait les discours haineux, je ne serais pas là pour le défendre ». Après avoir délibéré, le tribunal condamne Yassin E, dont le casier judiciaire est vierge, à huit mois de prison avec sursis et à son inscription au fichier des auteurs d'infractions terroristes (Fijait). Les deux associations recevront, chacune, 1 000 euros de dommages et intérêts. Le procureur réclamait huit mois ferme.
Nos juges... Et lui ont-ils fixé une date pour recommencer ?
Il en va du Coran et de ses hadiths comme de la Bible. Ces deux livres ne peuvent et ne doivent être vécus littéralement. Rares sont aujourd'hui les chrétiens qui y font une référence littérale. Les musulmans ne peuvent échapper à cette remise en cause de l'interprétation du Texte et de ses commentaires. Faute de quoi ils seront très souvent en contradiction avec les lois de la République qui elle doit être implacable pour faire appliquer la loi.
On marche sur la tête ! Ce type n’a rien à faire en France